samedi 24 décembre 2011

dimanche 18 décembre 2011

Chili. Quand le néolibéralisme triomphant se fissure


Réflexions sur le réveil des mouvements sociaux et les « indigné·es » chilien·nes

Le 22 septembre 2011, costume sombre, cravate violette, chemise bleu clair, le président Sebastián Piñera monte à la tribune de l'assemblée générale de l'ONU.Le chef du gouvernement chilien – et néanmoins entrepreneur multimillionnaire à succès –, affiche un beau sourire. En ces temps de crise mondiale du capitalisme, il revendique une économie florissante, à l'aune d'un taux de croissance de plus de 6 % du PIB (début 2011). Durant son bref discours devant les principaux chefs d'État de la planète, il tient aussi à faire référence au conflit social pour l'éducation qui traverse son pays depuis plusieurs mois : « La course pour le développement et la bataille pour le futur, nous devons la gagner dans les salles de classe » assène-t-il. Il assure que son gouvernement cherche « à garantir l'éducation pour tous et une éducation gratuite pour tous ceux qui le nécessitent ». Et si les jeunes chiliens luttent vaillamment, cela serait même la preuve de la bonne santé de la démocratie chilienne, tous mobilisés pour « une cause noble, grande, belle qui est celle de donner une éducation de qualité » au peuple. Magie du verbe politicien... Qui croirait entendre le représentant d'une droite dure, de retour à la tête de l’État 20 ans après la fin de la dictature militaire (1989) et engagée, coûte que coûte, dans la continuité de cette « révolution » capitaliste imposée à feu et à sang sur les cendres de l'Unité populaire (1970-73) et le cadavre de Salvador Allende[1]. Du fin fond des quartiers, au cœur des innombrables marches qui agitent les villes du pays, parmi les dizaines de lycées, collèges et universités occupés, un tel discours est vécu comme une provocation de plus. Le pouvoir ne comprend pas ce qui sourd au sein de larges secteurs de la société. Ou plutôt fait-il mine de ne pas comprendre. Le jour de cette intervention à l'ONU, manifestations et défilés hauts en couleur ont fait savoir à la Moneda[2] que le mouvement pour une éducation « gratuite, publique et de qualité » n'est pas mort. Le soir du 23 septembre, Camila Vallejo, l'une des dirigeantes de la Confédération des étudiants du Chili (Confech) remarquait, avec une certaine ironie, que le discours du président était plein de « contradiction, incohérence et inconsistance », au moment où celui-ci refusait toute négociation sérieuse et continuait à déployer son arsenal répressif[3]. Ce constat reste encore valable alors que décembre, et la fin de l'année scolaire, pointent leur nez.