vendredi 27 février 2009

VENEZUELA: 27 février 1989, le jour où le peuple s’est réveillé

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“Quelle social-démocratie n’a pas donné l’ordre de tirer
quand la misère sort de son territoire ou ghetto ?”
Gilles Deleuze (1)

Le 27 février 1989, débute à Caracas l’un des évènements historiques les plus signifiants du changement de période politique de la fin des années 80. Quelques mois avant la chute du mur de Berlin, les vénézueliens vivant majoritairement dans les quartiers pauvres (80% de la population) se révoltent contre l’application brutale des mesures du FMI par le vice-président de l’Internationale Socialiste de l’époque : Carlos Andrés Pérez (CAP). La réponse politique du gouvernement vénézuelien est brutale: déploiement l’armée et autorisation de tirer sur la foule. La répression se solde par un terrible bilan : près de 3000 morts en quatre jours.

El Caracazo constitue l’une des premières révoltes d’une nouvelle époque au confluent de trois phénomènes historiques profonds : la fin du stalinisme, la crise de la social-démocratie, et les contradictions sociales et démocratiques de l’hégémonie capitaliste. Cette révolte spontanée marque le réel début du processus révolutionnaire bolivarien et celui d’une longue série de révoltes dans le monde contre le visage libéral du capitalisme.


9 novembre 1989, quartier huppé d’Altamira, le ciel est bas sur Caracas, les nuages cachent le sommet de l’Avila, habituelle ligne d’horizon pour les “caraqueños”. La foule regarde cette grande obélisque et l’immense fontaine traversant la plaza Francia que l’on est en train d’inaugurer. Les flashs crépitent quand Carlos Andres Pérez serre la main de son invité de marque : François Mitterrand. Les 200 ans de la Révolution Française sont fièrement commémorés par les deux complices, alors que les familles vénézueliennes ayant pris la ville pour subvenir à leurs besoins, cherchent encore leurs disparus …



Du « Venezuela Saoudite » au Venezuela endetté.


“Quand les prix baisseront, nous resteront tranquilles”
(2) *
Manifestant du Caracazo

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Carlos Andrés Pérez (à droite) dans une réunion à Washington avec George Bush père.

Carlos Andrés Pérez, membre du parti Action Démocratique (AD), est élu président de la république en 1988 et prend ses fonctions le 4 février 1989. Fort d’une solide réputation de tiers-mondiste, de démocrate, il est très attendu pour enrayer la rapide dégradation des conditions de vie des vénézueliens due à une inflation atteignant les 29,46% en 1988. Il ne perd pas de temps (12 jours) pour appliquer son programme « Nouveau Venezuela ». Même si, pendant sa campagne, il a déclaré que le FMI « martyrisait les peuples », il apparaît très sensible aux conseils de ses représentants, présents au Venezuela depuis 1987 pour tenter d’enrayer la crise économique que vit ce pays pétrolier.

La chute du prix du pétrole a profondément entamé l’économie rentière du pays, et malgré la dévaluation du Bolivar, l’inflation demeure. Le système vénézuelien surnommé « Venezuela Saoudite », basé sur un Etat dont l’action se réduit à la redistribution de la rente pétrolière au profit d’une poignée de familles (tout en laissant sur le carreau 80% de la population), souffre d’un grave manque de liquidité. Le FMI propose un prêt de 4,5 milliards de dollars sur 3 ans, mais non sans conditions : « l’habilité du Venezuela à obtenir de nouveaux financements extérieurs dépend du programme économique mené »(3) . L’Etat doit en substance libéraliser son économie et laisser libre cours au marché.

Le 16 février, CAP présente son “paquete économico” (4) à la télévision, l’annonce est tant attendue que pour la première fois, l’élection de Miss Venezuela arrive seconde à l’audimètre ! Les vénézueliens assistent en direct à la présentation d’un programme libéral d’ajustement structurel : abandon des subventions assurant la rentabilité du très léger secteur industriel, privatisation des entreprises publiques, seconde dévaluation du Bolivar et dégel des prix, notamment celui du pétrole…

Les chauffeurs de bus répercutent la hausse du prix de l’essence dès le 27 février : 200% d’augmentation du ticket en une journée… Et ce, dans un contexte de forte mobilisation des étudiants et du personnel de l’éducation (230.000 grévistes pendant 17 jours). Tous ces éléments constituent le détonant mélange de la bombe « Caracazo ».

Réappropriation

“Ils ont exproprié le produit de leur travail, tout ce qui a un rapport avec
les besoins d’un être humain. S’ils ont eu la possibilité de le faire,
alors bravo, que ce rêve soit réalisé !” *

Roland Denis- Ancien ministre de la Planification.

Les oubliés de la "démocratie" se réapproprient le fruit de leur travail.
Les oubliés de la “démocratie” se réapproprient le fruit de leur travail.

Tout commence à Guarenas (cité-dortoir à 30 kms de Caracas), les travailleurs prennent violemment à parti les chauffeurs de bus et refusent de payer le ticket dont le prix a triplé. « Une troupe de la Guardia Nacional tente d’exiger que les chauffeurs baissent leurs prix ; un chauffeur refuse et un garde tire dans les pneus du bus, c’est le signal que tout le monde attendait » (5) . Premières victimes de la colère, les bus et minibus privés sont détruits à la barre de fer puis brûlés, les Guareños se dirigent spontanément vers les camions de marchandises et stoppent le trafic. Les petits commerçants ne voulant pas baisser les prix subissent les premiers saccages et pillages. Un commerçant déclare “Ça commence à s’organiser et comme un ban de langouste, à s’attaquer aux commerces et aux boucheries » (El Nacional 28/02/89). Rapidement, les manifestants se dirigent vers les immenses et emblématiques centres commerciaux vénézueliens (parmi les plus grands du monde). Les vitrines volent en éclats, tous les produits de consommation, surtout alimentaires sont mis sur le dos, ou dans des baluchons : rien n’est organisé mais la réappropriation est très efficace.

La Police Métropolitaine intervient, mais profitant du mouvement, les policiers exigent des améliorations de salaire et une meilleure couverture santé… Les renforts de la PM de Caracas déjà occupée, avec la DISIP (police politique), par la violente mobilisation dans l’éducation sont lents, le mouvement prends corps « Quand la police apparaît, un groupe se charge de les éloigner en lançant des pierres pendant que les autres continuent à ouvrir les commerces » (El Nacional 28/02/89). La nuit tombée, alors que tout le monde attend une accalmie, la situation s’aggrave. Les habitants des quartiers populaires “los ranchos” (de La Vega, de Petare, de Catia, del Valle, de 23 de enero, etc) commencent à descendre massivement dans le centre ville.

La journée du 28 prend une proportion extraordinaire, la ville est prise par les oubliés, les invisibles. Les médias, diffusant en boucle les images de pillage, font passer les manifestants pour des hordes de délinquants. On entend pourtant des slogans de plus en plus politiques : “augmentation des salaires !” ou “baisse des prix de l’alimentation !”… Et les manifestants agissent avec calme et dignité “Non, je ne me repentis pas. C’était un acte honorable. A la maison j’ai à manger, quatre bermudas, un tee shirt, une paire de chaussure… Est ce que je le referais ? Je ne sais pas. » (Manifestante dans El Diario de Caracas 07/03/89) Alors que les banques et les postes de police sont ravagés, on constate que la révolte garde une logique : les pharmacies, les Hôpitaux et les écoles sont épargnés “La seule chose que l’on a laissé ici à El Valle- a été la Ferretería Futuramic. Personne ne l’a pillée parce que le propriétaire est quelqu’un de bien, qui vend pas cher et se comporte bien avec les gens du quartier” (El Nacional 03/03/89). On voit ça et là des fêtes, des barbecues profitant de la viande et des appareils de son «récemment acquis».

CAP rentre de Barquesimeto dans la nuit du 27 et constate l’ampleur de la situation. Une réunion a lieu à Miraflores (palais présidentiel) avec les représentants du gouvernement, les autorités militaires et des représentants des partis politiques d’opposition. Ces derniers ne divergent que sur un seul point : la suspension des garanties constitutionnelles. Le MAS (Mouvement Vers le Socialisme), par exemple, pensait qu’il était nécessaire de “rétablir l’ordre public sans suspension des garanties de liberté. Il est clair qu’il y a eu de graves débordements et qu’il règne une climat d’insécurité et de peur” (El Nacional 05/03/89). Devant l’unanimité d’approbation du recours à la répression, CAP met en œuvre un plan de déploiement des Forces Armées Nationales pour le « rétablissement de l’ordre » : le Plan Avila.

Massacre

« Nous sommes disposés à tuer qui que ce soit, ce sont les ordres que nous avons reçus»

Un soldat cité dans journal El Nacional du 3 mars 1989

“Nous avons tous contribué au rétablissement des procédures
normales de production de biens et de services pour conserver
et préserver le bien être. [...] Le peuple et le gouvernement ont constitué,
une fois de plus, une formidable équipe de travail nommée : Venezuela “*

Eladio Larez - Président de la chaîne RCTV en direct pendant le massacre.

La répression est totale, hommes, femmes, jeunes et vieux sont massacrés.
La répression est totale, hommes, femmes, jeunes et vieux sont massacrés.

A 16h, le 28 février, on déclenche le Plan Avila. Il permet la suspension des garanties constitutionnelles : liberté de la presse, liberté de manifester, de réunion, d’opinion, suspension de l’inviolabilité des foyers, de l’interdiction des détentions abusives… L’armée peut agir en toute impunité. Pendant quatre jours, la répression est totale dans les rues et jusque dans les habitations : des hommes, des femmes, des jeunes sont abattus froidement jusque dans leurs logements*.

Un médecin témoignera plus tard : « Dès le mardi, trente morts et presque trois mille blessés sont arrivés, la majorité touchés par des armes de guerre. Au début, seulement des jeunes hommes, mais rapidement sont arrivés des femmes, des enfants et des vieux […] J’ai vu un enfant de neuf ans avec une énorme blessure par balle sur la poitrine. […] On aurait dit une guerre, chaque minute, il y avait un nouveau blessé. » (El Nacional 02/03/89)

La foule a du mal à compter ses morts, la recherche des victimes est souvent impossible car des fosses communes sont creusées par l’armée pour faire disparaître les centaines de corps.

La répression a duré jusqu’au 2 mars 1989. Le gouvernement rendra public le chiffe officiel de 243 victimes, toutes les analyses s’accordent pourtant sur plus de 3000 disparus. On se demande encore comment toute l’armée vénézuelienne a pu collaborer à ce niveau à cette chasse ignoble. Le lieutenant colonel de l’armée vénézuelienne Hugo Rafael Chavez Frias étant souffrant ces jours là, on ne pourra jamais savoir ce qu’il aurait fait. Une chose est sûre, un secteur important de l’armée autour du MBR-200 (6) prend alors conscience de la barbarie de ce pouvoir et rêve de changement.

Le 4 février 1992, ces mêmes forces tentent un coup d’Etat contre CAP, celui-ci échoue mais Chavez passe 10 secondes à la télé vénézuelienne, assume la responsabilité de cet échec (jamais un homme politique n’avait pris ses responsabilités publiquement au Venezuela) et affirme que leurs objectifs ne sont pas atteints “por ahora” (« pour l’instant »). Ce mot résonne dans la tête de tous les meurtris du Caracazo et le vent commence à tourner quand la cour suprême de justice destitue CAP pour corruption en 1993. L’élection de Chavez en 1998 et le processus révolutionnaire bolivarien s’avèrent être une recherche de débouché politique à cette révolte.

De la spontanéité

« Absolument tous les organismes de police, de sécurité,
[…] les directions et sections de renseignement de toutes
les Forces Armées Nationales ont été prises par surprise »
(7)
Rafael Rivas-Vasquez- directeur de l’Agence de Renseignement Vénézuelienne en 1989

La révolte s'est spontanément tournée vers les petits et grands commerces devenus hors de prix.
La révolte s’est spontanément tournée vers les petits et grands commerces devenus hors de prix.

La spontanéité du mouvement pose directement la question de la réappropriation. Sans aucun appel de mouvements politiques, de syndicats, d’organisations populaires quels qu’ils soient, le peuple vénézuelien a fait preuve d’une incroyable cohérence. Ceci montre qu’une organisation propre aux quartiers vénézueliens, même naissante ou latente, existait bel et bien. Plusieurs phénomènes expliquent peut être cette cohérence, notamment la présence de groupes de la théologie de la libération ou d’ex-guérilleros, présents depuis les années 1970. Caracas a compté plus de 300 hommes en armes à cette période, et le FLN-FALN (8) comme les tupamaros sont des groupes très influents dans les quartiers les plus peuplés de Caracas.

Certains groupes de guérilla avaient, depuis le début des années 1980, progressivement changé leur stratégie de lutte, à la recherche d’une stratégie mieux adaptée que les méthodes cubaines ou colombiennes, et préféré l’organisation communautaire, la formation politique, et le travail culturel, en s’affrontant constamment au trafic de drogue, principal obstacle à l’organisation communautaire. Ceci entraînait des combats d’hégémonie dans certains quartiers, comme par exemple La Vega (quartier pauvre de 700.000 habitants) où la population était habituée et même actrice de cet affrontement. Un terrain propice à la mobilisation populaire ? Ceci est indéniablement un facteur déterminant.

Le mouvement étudiant a joué un rôle important dans la structuration, l’Université Centrale du Venezuela (UCV) est devenue le centre de commande, pas seulement pour les leaders étudiants, mais aussi pour les dirigeants populaires. Le 27, après une grande assemblée de près de onze heures une grande manifestation démarre de l’Université vers Plaza Venezuela, où commencent à émarger des barricades. La jeune dirigeante étudiante Yulimar Reyes a été la première tuée de la journée du 27, sa mort a eu un impact énorme sur la radicalisation du mouvement.

Le Caracazo a pourtant montré les limites de la spontanéité d’action et, à partir de cet événement, un saut qualitatif s’est produit dans l’organisation communautaire, ce qui a permis de construire dans les quartiers un tissu social et militant capable d’accueillir plus tard, avec plus ou moins d’indépendance avec le gouvernement bolivarien, les mesures sociales et de démocratie participative et protagoniste qui caractérisent le processus politique actuel.

Le facteur central expliquant la spontanéité du mouvement est l’absence de réelles forces de gauche, syndicales ou politiques, présentes au Venezuela. Alors qu’on l’a vu, le parti AD, surnommé le « parti du peuple » est totalement converti au libéralisme, la centrale syndicale majoritaire, la CTV, est elle aussi totalement inscrite dans le système de corruption assurant la distribution des pétrodollars de PDVSA (l’entreprise pétrolière) à l’oligarchie vénézuélienne. Le Parti Communiste Vénézuelien, le MAS, le parti Causa Radical était incapables à l’époque de réagir, le 26 février 1989 le MAS avait publié un communiqué demandant timidement à CAP « un programme d’ajustement plus graduel, équilibré et équitable ». Très déstabilisés par les échecs des guérillas de libération nationale et la fin palpable du modèle soviétique, ces forces avaient pris, depuis les années 80, un tournant réformiste qui les isolaient du peuple. Ils sont allés jusqu’à soutenir, en 1994, le président Caldera, successeur de CAP qui a notamment continué les réformes libérales (notamment les privatisations). Le volcan Caracazo a jailli entre deux plaques tectoniques de l’histoire : la fin du stalinisme et la crise de la social-démocratie.

Crise de la social-démocratie…

“Est-ce juste que dans leur pseudo démocratie,
la vie humaine n’ait aucune valeur ?”*

Manifestant du Caracazo

La présence à Caracas le 9 novembre 1989, d’un François Mitterrand fraîchement réélu, est révélatrice des relations (inchangées après le Caracazo) entre l’Internationale Socialiste et le parti Action Démocratique (AD). De cette visite, l’Histoire ne retiendra pas son malaise pendant le voyage, mais bien son silence, sur les lieux de ce massacre à la portée politique inouïe. Même Le Monde sous la plume de Thierry Desjardins annonce « CAP a commis une grave erreur en lançant ses troupes de combat sur la ville (…) A partir de ce moment, Carlos Andrés Pérez s’est entaché de sang ». (Le Monde du 07/03/89 repris dans El Nacional du 08/03/89)

En 1993, après sa destitution pour corruption, le bureau de l’Internationale Socialiste envoie en communiqué un texte témoignant à Carlos Andres Pérez toute son amitié et son estime (9) . Une méconnaissance de la situation ? Sûrement pas, l’Internationale Socialiste devait beaucoup à CAP … Bernard Cassen écrivait dans le Monde Diplomatique (10) “M. Carlos Andrès Pérez[...] avait été généreux avec ses amis européens : il est de notoriété publique que, sous la direction de M. Felipe Gonzalez, le Parti socialiste espagnol (PSOE) a largement bénéficié de sa « solidarité » financière. D’où, sans doute, l’éloquent silence des partis socialistes européens, et notamment du PS français, lors du coup d’Etat anti-Chávez du 11 avril 2002.” . On peut y voir une « solidarité » financière, mais le plus significatif est peut être bien une solidarité de positionnement politique : l’application plus ou moins brutale des politiques du FMI, d’un côté comme l’autre de l’Atlantique.

D’éminents représentants ou soutiens de l’Internationale Socialiste en Amérique Latine ont subi les foudres des révoltes populaires. Le président bolivien Gonzalo Sánchez de Lozada et son bras droit Jaime Paz Zamora (l’un des 34 vice-présidents de l’IS) ont dû démissionner au cours de la “guerre du gaz” en 2003. En 2005, le peuple équatorien aux cris de “Fuera Lucio, que se vayan todos ! ” (11) a fait destituer le président Lucio Gutierrez, soutenu par le Parti Socialiste, pour ne pas avoir tenu ses engagements de campagne.

L’espoir résiderait-il dans le démarquage clair et le dépassement de la gauche qui a capitulé ? Les processus politiques latino américains les plus intéressants, au Venezuela, en Bolivie et en Equateur nous montrent que oui.

Julien Terrié
Le 27 février 2009

(1) DELEUZE G. , Qu’est-ce que la philosophie ?, Minuit, p. 103.

(2) Les citations pointées par un * proviennent de témoignages extraits des archives vidéos du Caracazo, et récoltés par la coopérative COTRAIN http://www.youtube.com/watch?v=vg7mvx3IYRw

(3) LEVEQUE Frédéric, Le ’Caracazo’, c’était il y a 15 ans, CADTM, http://www.cadtm.org/spip.php?article500

(4) « Paquet économique» CAP a choisi faire passer toutes les mesures en une seule fois.

(5) COLMENAREZ Elio : LA INSURRECCIÓN DE FEBRERO: a 20 años del Caracazo. marxismo.info

(6) Mouvement Bolivarien Révolutionnaire des 200, groupe de militaires bolivariens issus du travail politique du parti Causa Radical dans l’armée vénézuelienne.

(7) RIVAS-VASQUEZ Rafael, EL DÍA QUE BAJARON LOS CERROS, Febrero de 1999, http://www.amigospais-guaracabuya.org/oagrv002.php

(8) Front de Libération National – Forces Armées de Libération Nationale

(9) ROGALSKI Michel, « L’Amérique Latine et nous », Fondation Gabriel Péri, http://www.gabrielperi.fr/L-Amerique-latine-et-nous

(10) CASSEN Bernard, « Union sacrée à Strasbourg », avril 2004, Monde Diplomatique http://www.monde-diplomatique.fr/2004/04/CASSEN/11132

(11) « Dehors Lucio, qu’ils s’en aillent tous ! »

mardi 17 février 2009

Evo Morales à Sciences Po: "Nous sommes une réserve éthique et morale"


Le président de la Bolivie, en visite à Paris mardi 17 février, a donné une conférence à Sciences Po. Contretemps vous propose sa traduction.

« Comme nos aïeuls indigènes l’avaient promis, nous sommes aujourd’hui des millions à transformer le pays»

En Bolivie, les mouvements sociaux sont les interlocuteurs de la société civile face à l’Etat. Dans l'ensemble de l’Amérique latine ces mouvements luttent pour des transformations attendues depuis si longtemps. Ces luttes sociales ont fait beaucoup pour la démocratie, comme par exemple la Centrale Ouvrière Bolivienne pendant les dictatures militaires. La lutte anti-coloniale des nos aïeuls nous a légué une tradition de résistance opiniâtre contre l’invasion et contre l’oppression : que l'on songe à Tupac Katari et tous ces aînés qui ont été les premiers à s'être battus pour nos ressources naturelles, ou comme on dit dans le Mouvement Paysan Indigène, pour la terre et le territoire. Le Mouvement Indigène a depuis toujours été à la tête de ces revendications. Tupac Katari avait affirmé avant d’être écartelé en 1871 : « je meurs, mais je reviendrai, et je serai des millions ». Après avoir obtenu en 2005 plus d’un million de votes et après en avoir obtenu plus de deux millions pour approuver la Constitution Politique de l’Etat, je peux dire que Tupac Katari a tenu sa promesse, car nous sommes aujourd’hui des millions pour garantir une profonde transformation de notre pays.

Mais il ne s’agit pas seulement des luttes des indigènes. Les guerres d'indépendance ont été marquées par de grandes insurrections en coordination directe avec des métis : les luttes de Juana Azurduy de Padilla, de Moto Mendez, de Simon Bolivar, de José Antonio Sucre; et après la République, la lutte de Marcelo Quiroga Santa Cruz par exemple pour la nationalisation; après la guerre de Chaco, celle des militaires patriotes qui ont été les premiers à avoir nationalisé les hydrocarbures et le pétrole, acte de naissance du nationalisme militaire dans l’Armée Bolivienne.

Toutes ces luttes continuent aujourd’hui, s'opposant à des groupes qui n’acceptent pas les transformations en cours et qui ne veulent pas l’égalité, la dignité, et la justice.

Un « gouvernement du mouvement social »

Nous pouvons dire que notre gouvernement est aujourd'hui un gouvernement des mouvements sociaux, car les soldats de cette révolution démocratique et culturelle sont massivement issus des rangs du Mouvement Paysan Indigène, alors qu'heureusement les membres de la Centrale Ouvrière Bolivienne et d’autres forces sociales se rallient aujourd'hui à cette transformation pacifique et culturelle.

Il existait auparavant une multitude de luttes sociales, de marches à partir de grandes villes boliviennes revendiquant des transformations profondes. Mais ces mobilisations n’ont pas été suffisantes, car les accords obtenus n’ont jamais été respectés. Je me rappelle l’une de ces marches historiques, celle de Chapare (1994), une « marche fantôme » selon les ministres, car leurs avions étaient incapables de nous repérer sur ces chemins sauvages que nous préférions aux grandes routes en raison des tensions et des répressions. Nous sommes pourtant arrivés des milliers à La Paz où certains camarades ont été détenus et libérés par la suite grâce à la lutte du peuple. Après cette grande marche de septembre 1994, nous avons obtenu un accord pour discuter de la dépénalisation de la feuille de Coca, pour l’acceptation des droits des peuples indigènes et pour la défense de la terre et du territoire.

Au mois de décembre, l’accord n’était pas encore appliqué. Nous avons alors lancé une campagne nationale avec nos principales organisations militantes, différentes entités paysannes et syndicales, comme la CSUTCB[1], la Confédération des Colonisateurs de Bolivie, composée par des indiens quechuas et aymaras qui se battent pour l’obtention des terres et enfin les Bartolinas qui est la grande organisation des femmes paysannes et indigènes. Avec ces organisations, nous avons revu l’accord signé au mois de septembre, dont aucun des points n’avait été respecté. Nous avons réalisé que la seule mobilisation syndicale, les marches, ne permettent pas d'obtenir la satisfaction de nos revendications. « Par les marches on ne gagne que du papier » : de ce constat nous avons conclu que la seule manière de faire appliquer nos revendications était de devenir un pouvoir politique. Il nous fallait construire un instrument politique de libération et nous avons donc décidé d'en finir avec le système politique en place.

Cela n'a pas été évident. Je me rappelle au début de mon engagement syndical, quand un de nos dirigeants exposait au gouvernement la nécessité de réformes profondes et structurelles, le ministre ou le vice-ministre répondait : « vous êtes en train de faire de la politique, vous n’avez pas le droit de faire de la politique, votre politique c'est la « hache » et la « machette ».

Quelques années auparavant, en 1985, l’ADN[2] progressait dans les centres miniers et le MNR[3] dans la campagne. Ni l'un ni l'autre ne rassemblait plus de 50% des voix, mais ils se sont réunis sous l’Alliance Patriotique, qui a finalement avalisé le renvoi massif de travailleurs miniers, dont plus de 30 000 se sont retrouvés au chômage. A partir de là, les privatisations et le saccage de nos ressources naturelles s'est mis en place et tout cela avec les votes du peuple. Nous avons compris par la suite que notre politique ne peut pas se réduire à « la hache » et à la « machette » et comme n’importe quel citoyen nous avons le droit de faire de la politique. Nous avons décidé donc de passer d’une lutte sociale et syndicale, à une lutte électorale, à la construction d’un instrument politique, qui est aujourd’hui le Mouvement vers le Socialisme (MAS).

« Le MAS est le résultat d’autant d’années de luttes »

Pour parler des origines du MAS, il faut rappeler que le gouvernement des Etats-Unis finançait la Cour Nationale Electorale Bolivienne sous condition qu'elle ne reconnaisse pas la légalité des partis politiques directement issus des mouvements sociaux, l’ASP[4] d'abord puis l’Instrument Politique pour la Souveraineté des Peuples (IPSP). Autrement dit, nous n’étions pas reconnus avant de prendre le pouvoir et nous sommes devenus le gouvernement grâce au MAS. Au début le MAS était un parti sans militant, c’était un groupement d’entités syndicales. Nous avons commencé à militer en tant que membres du MAS jusqu'à nous l'approprier, en dépit des pressions du gouvernement américain de ne pas reconnaître ce mouvement politique né du mouvement social.

C’est la première fois dans l’histoire de la Bolivie qu’un parti prônant une politique anti-néolibérale, anti-coloniale et anti-impérialiste naît du Mouvement Paysan Indigène. Les partis de gauche traditionnels étaient toujours le fait d'intellectuels et de politiciens, qui sous couvert de construire « le parti du peuple » s'organisaient et rédigeaient leur programme sans sa participation. Or, notre mouvement politique est réellement l'émanation de ces innombrables marches, de tous ceux qui sont morts durant autant d’années de luttes , des 180 ans de vie républicaine. Fondamentalement, ces vingt dernières années de résistances aux politiques néo-libérales ont construit le mouvement social des plus démunis de mon pays.

Une fois notre mouvement politique construit, nous avons dû surmonter, partout, d'immenses difficultés. Dans certaines régions, des camarades des mouvements paysans ne voulaient pas des professionnels politiques. J’ai dû expliquer inlassablement que la coordination entre conscience sociale et capacités professionnelles et intellectuelles était nécessaire. Nous avons fini par convaincre, cela a fait partie du processus et nous avons avancé petit à petit.

En 1995, nous nous sommes présentés pour la première fois aux élections municipales et nous avons gagné plusieurs mairies, à Cochabamba et à Chapala. Au début c’était compliqué car nos dirigeants syndicaux ne voulaient pas devenir maires mais rester en tant que dirigeants des fédérations. A ce moment c’était plus important pour nous de diriger les syndicats que d’êtres maires ou députés.

En 1997, nous avons participé aux élections nationales sous le nom de Izquierda Unida, qui était crédité de 0,9% dans les sondages. Pourtant nous avons obtenu presque 4% et quatre députés.

En 2002, je me suis présenté par la première fois comme candidat à la présidentielle. Les enquêtes d'opinion nous prédisaient 7%, tandis que d’autres partis politiques comme Bolivia Libre ou le MNR étaient donnés à 35%. Résultat : les cinq partis en tête nous ont battus avec moins de 1% d'écart. J’étais surpris, je ne m'attendais pas à ces résultats et j'ai eu peur en tant que candidat à la présidence car nous n’avions pas encore de programme de gouvernement. Notre programme était comme celui de n’importe quelle organisation syndicale. Légalement, je pouvais devenir président si le Parlement décidait de me nommer car nous avions obtenu la deuxième place. Dans notre esprit, nous avions gagné les élections en 2002, bien qu’on nous les ait volées, car l’ambassadeur des Etats-Unis, Manuel Rochas, avait négocié avec les dirigeants politiques du BL et du MNR.

A ce moment, nous n’avions pas de programme de gouvernement ni réfléchi à de possibles ministres. Par exemple, nous avions obtenu deux sièges de Sénateurs dans deux départements sans en avoir présenté de candidat. Voilà l’histoire de ce mouvement politique qui se constituait au même temps que la conscience du peuple bolivien s’affirmait dans la lutte pour la rappropriation de nos ressources naturelles.

Les élections de 2005 arrivent à la suite de toutes ces années de lutte. Mais cette fois-ci, nous nous étions préparés pour les gagner. La droite avait commis des erreurs politiques qui ont favorisé une prise de conscience majeure du peuple bolivien. En 2002 par exemple j'ai été expulsé du Parlement parce que j’avais dit qu'il était « la première mafia de l’Etat ». Et je leur ai dit encore: « vous m’expulsez, mais aux prochaines élections, je reviendrai avec 30 ou 40 parlementaires. »

« C’est la force sociale qui résiste au racisme envers les peuples indigènes »

Ce que je veux que vous compreniez, c’est que le processus révolutionnaire démocratique qu’on est en train de vivre en Bolivie, n’est pas dû à Evo Morales, mais à la lutte des mouvements sociaux, des secteurs les plus discriminés de l’histoire bolivienne, comme l’est le Mouvement Paysan Indigène. Ce mouvement a été toujours très combattu, même par les politiques européennes qui ont tout fait pour en finir avec lui et aujourd’hui dans certains pays de l’Amérique latine il ne reste plus de peuples indigènes, malgré la résistance de nos aïeuls à cette oppression.

Le racisme envers les indigènes a été en général très fort, dans certaines revues on pouvait lire des propos comme : « si nous voulions, nous pourrions faire marcher ces indiens comme des animaux ». Un autre exemple, en 1994, il est apparu dans le journal bolivien El Deber une caricature représentant un bonhomme avec un gros ventre, des plumes sur la tête, couvert des feuilles de coca en bas du ventre, qui s’appelait « l’indien rebelle Evo Morales » et la légende disait: « il faudrait tuer celui-là ». Imaginez-vous le racisme qui existe en Bolivie pour que certains puissent tenir des propos pareils. Les forces sociales résistent à cette politique raciste, car elle existe encore, et quand nous revendiquons les luttes du Mouvement Paysan Indigène et menons des transformations profondes par le vote du peuple, on nous traite, nous, de racistes.


« Aujourd’hui, nous avons décidé de refonder la Bolivie avec la participation du peuple bolivien »

C’est la première fois que le peuple bolivien a le droit de changer et d’écrire sa propre constitution. Il y a eu au moins 18 constitutions depuis la fondation de la Bolivie en 1824, mais seuls les partis libéraux, puis néo-libéraux se sont permis de la modifier sans la participation d’aucun secteur populaire. Aujourd’hui, nous avons décidé de refonder la Bolivie mais avec la participation du peuple bolivien

Il est très important de suivre ce processus de libération qui est une transformation profonde, accompagnée par le peuple. Lors du référendum constitutionnel les secteurs les plus racistes ont tout fait pour que cette nouvelle constitution ne soit pas approuvée, en défendant principalement l’autonomie des territoires les plus riches, la capitalia et la propriété privée. La propriété privée ainsi que l’autonomie sont garanties par la Nouvelle Constitution, mais sous une autre forme que celle voulue par la classe dominante. Les votes obtenus sont le résultat d’une forte conscience et de la confiance du peuple envers le nouveau gouvernement. Bien que la classe dominante n'a reculé devant rien pour me faire partir du pouvoir, le référendum constitutionnel a été approuvé par 67% de votes. Alors, ils ont osé un coup d’Etat civil, mais ils ont échoué. Il y avait des conspirateurs externes, comme l’était l’ambassadeur des Etats Unis, mais depuis que je l'ai fait expulser les conspirations ont perdu de leur force et la droite bolivienne sa tête.

Nous avons entamé alors une lutte anti-coloniale, anti-néoliberale et anti-impérialiste, parce que c’est la lutte historique menée par nos peuples. Ce que vous avez fait ici avec la Révolution Française, nous sommes en train de le faire maintenant en Bolivie, mais en démocratie.

La Nouvelle Constitution Politique de l’Etat Bolivien concrétise la lutte de nos ancêtres : l’eau, l’électricité, les télécommunications sont des services élémentaires publics et ne peuvent être privatisés, il s'agit de droits humains. C’est la première fois que les services basiques sont déclarés en tant que droit humain dans une constitution en Amérique latine.

Tous les droits des hommes et des femmes et principalement ceux des femmes, sont garantis par la Nouvelle Constitution. En outre, nous avons fixé le droit de vote de tous les citoyens boliviens habitant à l’étranger.

« Nous sommes une nation pacifiste »

Lors de mon service militaire en 1978, on me disait qu’aucun militaire étranger en tenue et armé, n’avait le droit de circuler dans le territoire bolivien. En 1988, j’ai vu à Chapala des militaires américains de la DEA, armés, commandant les forces armées et la police nationale, et qui participaient à la répression. Je l’ai vu de mes propres yeux ; ils avaient même installé une base militaire à Chimoré ; les anciens présidents boliviens devaient demander l’autorisation à l’ambassade américaine pour y faire atterrir leurs avions. Aujourd’hui la situation est tout autre et pour la première fois dans l’histoire bolivienne, un principe constitutionnel établit qu’aucune base militaire étrangère n’est autorisée dans le territoire national.

En outre, l’Etat bolivien ne peut déclarer la guerre à aucun pays voisin, constitutionnellement nous sommes des pacifistes ; ce que ne veut pas dire que le pays ne peut pas se défendre face à une éventuelle attaque. Dans les guerres, seules les multinationales et les grandes industries d’armes gagnent, les peuples jamais.

Par l’influence de l’oligarchie de Santa Cruz, notre projet constitutionnel a été combattu dès le début, par des humiliations envers mes frères et camarades. Toutefois, le « oui » au référendum l'a emporté même dans cette région, car si l’oligarchie est un groupe puissant, elle n’est pas le peuple.

Moi, je crois aux forces sociales, à celles du monde entier, car elles sont les puissances motrices qui changent l’histoire, qui changent des politiques, des programmes, et en Amérique latine, qui changent des présidents. On pariait même pour savoir quel mouvement paysan d'Amérique Latine serait le premier à faire tomber des présidents, car la plupart des gouvernements d'Amérique latine mènent des politiques néo-libérales, de saccage permanent, de privatisation des entreprises et des services publics. Nous travaillons ensemble pour tout changer en démocratie, car nous défendons le droit à la vie, à la justice, à la souveraineté.

Même si le référendum constitutionnel est globalement passé avec un 61% , les points de la Constitution qui concernent la limitation de la propriété de la terre ont remporté plus de 80% de suffrages positifs dans les 9 départements, parce que par le vote du peuple, nous sommes en train d’éliminer le latifundium en Bolivie.

Plus du 90% des médias appartiennent aux terriens et aux grands patrons. Et ces derniers temps les chefs de l’Eglise catholique se sont joints au boycott de la Nouvelle Constitution. Il ont diffusé des affiches qui disaient : « OUI à Dieu, NON à la Nouvelle Constitution » , dans ce sens le « Oui » serait le diable, Evo Morales . Quand le OUI a la Nouvelle Constitution a gagné, j’ai dit « Dieu a perdu, que deviendra alors la coupole de l’Eglise Catholique de la Bolivie ? ». Mais je dois reconnaître pourtant la lutte de certains prêtres qui travaillent dans les campagnes et qui ont soutenu le « oui » à la Nouvelle Constitution.

« La Bolivie, cette terre-mère si riche et ses enfants si pauvres »

Moi, je n’ai pas eu l’opportunité d’étudier à l’université, où tous les politologues se préparent pour devenir les futurs présidents de leurs pays. Même pour devenir syndicaliste j’ai du passer des ateliers de formation, pour devenir président : rien. Je me sens encore président à moitié, pourtant, je comprends davantage la situation économique et sociale de la Bolivie et je suis sûr de la richesse de ses ressources naturelles. Voilà la Bolivie, la terre-mère qui possède autant de richesses, et son peuple, autant de pauvreté, cela est inadmissible.

La Bolivie possède 15 000 km2 des sols avec toutes formes de lithium. Le fer, dans l’orient bolivien, le pétrole qui coule dans notre terre, ou encore l’énergie électrique qui peut se produire en Bolivie. Par l’exploitation de toutes ces ressources naturelles, la Bolivie aura un grand avenir .

En outre, nous sommes en train de d’organiser l’UNASUR (Unité Sud-américaine) Grâce à la coopération d’autres pays de l’Amérique latine, comme le Chili, le Brésil et le Venezuela, et de la même manière que l’Europe a son Parlement, l’Amérique latine aura le sien qui siègera à Cochabamba. La planification du développement de toute l'Amérique Latine débutera à la tenue de ce Parlement.

La Bolivie et l’ensemble de l’Amérique du Sud ne donnent pas seulement de l’espoir à l’Amérique latine mais au monde entier, car nous possédons des resserves naturelles et écologiques. Mais plus encore, nous sommes une resserve étique et morale, car quelque chose de très important a été inclut dans la Nouvelle Constitution Bolivienne : ama sua, ama quella, ama llulla [5], car la corruption, le despotisme et la bureaucratie sont des caractéristiques d’un état colonial et c’est pour cette raison que nous luttons pour la décolonisation.

A tous ceux à qui le sujet indigène dérange, je veux leur dire qu’on est tous des originaires, seulement qui a des « originaires » millénaires très pauvres et des « originaires » contemporains, peu nombreux, mais très riches et avec la Nouvelle Constitution, nous cherchons l’équilibre et l’égalité de tous ces « originaires » qui habitent cette terre-mère qui est la Bolivie.

Traduction et retranscription Bettina Ghio. Photographies Naima Di Piero.


[1] Conféderacion Sindical Unica de Trabajadores Campesinos de Bolivia

[2] Accion Democratica Nacionalista.

[3] Movimiento Nacionalista Revolucionario.

[4] Assemblée pour la Souvéranéité des Peuples.

[5] Dévise de l'empire Inca signifiant « ne pas voler, ne pas paresser, ne pas mentir »

Evo Morales